PARENTS N° de Décembre par Florence Arnold-Richez
Grâce à cette petite fille, Aleyna, le premier médicament de thérapie génique va être commercialisé dans quelques mois. Une première mondiale réalisée grâce aux recherches conjointes des Théléton français et italien. un espoir pour les enfants qui sont atteints d'un grave déficit immunitaire rare, appelé ADA-SCID, dont la famille d'Aleyna s'est fait le porte-drapeau. Grâce à cette petite fille, ex bébé-bulle, et aux onze autres enfants traités par la même équipe, la recherche en thérapie génique devient concrète. Et la mise au point pour les douze enfants de ce médicament-là ouvre la voie à bien d'autres traitements innovants.
Aleyna nait en 2002, à Bruxelles. Très vite, le bébé chétif vomit, crie, souffre. A un mois et demi, elle est terrassée de multiples infections. Qu'a-t-elle ? Ses jeunes parents, Filiz, 19 ans et Yusuf, 20 ans, turcs, font la tournée des médecins. En vain. Elle est alors admise à l'Hôpital de enfants Reine-Fabiola. Et là, première rencontre avec une fée en blouse blanche, le Dr Alina Ferster, spécialiste en oncologie. Déclic : "Votre petite fille est privée de toute défense immunitaire. Son sang est dépourvu de globules blancs et son organisme ne peut pas résister aux microbes... Elle a une maladie orpheline rare, l'ADA-SCID...". Son futur est très sombre. Il durera deux ans. Pas plus! Le médecin propose à Filiz et Yusuf un médicament américain très cher, à base d'enzyme bovine, qu'il faut administrer à vie, une fois par semaine, à la petite fille. Des associations se mobilisent pour faire venir le médicament d'outre-Atlantique. Malheureusement, il ne marche pas très bien.
Fin 2003, l'oncologue, pugnace, leur propose une autre solution. Plus inédite. Et plus innovante. Elle leur permet de partir à Milan, pour faire entrer la petite malade dans le protocole d'essai de thérapie génique d'une deuxième bonne fée : le Pr Maria-Grazia Roncarolo, la pédiatre qui dirige le laboratoire Tiget de Milan (Thelethon institute for gene therapy). Le 14 janvier 2004, la famille débarque à l'Hôpital San Raffaele. La petite Aleyna a 17 mois. L'essai thérapeutique débute. Le médecin isole des cellules souches de la moelle osseuse de l'enfant. Elle les met en culture avec "son médicament", le vecteur (un rétrovirus qui n'est plus nocif) qui apporte le gène manquant aux chromosomes des cellules. Ainsi dopées et injectées, celles-ci produisent l'enzyme dont l'absence était responsable du déficit immunitaire et les lymphocytes qui font défaut à l'enfant. Et ça marche !
Sur le plateau du 22ème Téléton, les 5 et 6 décembre prochains, vous retrouverez Aleyna. Pour aider les chercheurs, une fois encore, à relever un défit exceptionnel : celui de la médecine de demain. Un bel enjeu pour cette brunette espiègle, qui conjugue désormais son proche "âge de raison" avec la légèreté de l'être. Et de la vie retrouvée, après des années de combat contre la maladie.